Les origines du château

Situé à l’endroit où le cours de la rivière connaît son plus fort rétrécis-sement, ce surplomb permettait un contrôle efficace du réseau fluvial et des voies terrestres.

Les recherches archéologiques ont montré l’ancienneté de la présence de l’homme sur le lieu. Il y taillait le silex au Mésolithique*: des rejets de taille ont été découverts sous l’actuelle terrasse du logis royal. Vers 4000 avant J.-C., une tombe monumentale du type «cairn»* (n° 14) fut construite. C’est la trace la plus ancienne aujourd’hui connue de l’utilisation du site.

Les Andes (tribu gauloise de la région d’Angers) y avaient leur oppidum* principal que les fouilles archéologiques ont révélé sous la cour seigneuriale.
Dans la ville créée par les Romains, Juliomagus (littéralement «le marché de Jules»), le site du château était occupé par une vaste terrasse quadrangulaire, comportant un temple peut-être dédié à l’empereur.

Angers, un lieu stratégique

Du juliomagus aux plantagenêts

Le château, vingt siècles plus tard, garde toujours la trace de cette implantation puisque le plan de l’actuelle cour seigneuriale, bordée par la galerie de l’Apocalypse (n° 12), la salle comtale (n° 13), le logis royal (n° 4), la chapelle (n° 5) et le châtelet (n° 2) correspond à celui de la terrasse antique. Au Bas-Empire, l’enceinte urbaine construite vers la fin du IIIe siècle après J.-C. passe sous le château en longeant le rempart sud. La courtine* est encore visible avec la base d’une tour sous la galerie de l’Apocalypse dans la nef de la chapelle Saint-Laud (n° 15). Elle subsiste sur plus de 5 m de hauteur pour plus de 4 m d’épaisseur au pied du talus d’artillerie du rempart sud.

Le traité d’Angers fixe la frontière bretonne sur la rive droite de la Maine. Pour des nécessités de contrôle, le roi Charles le Chauve décide en 851 d’installer un comte à l’extrémité du promontoir. Il doit faire face aux raids vikings qui viennent gravement frapper la ville d’Angers à plusieurs reprises à partir de 854.

Peu à peu le comte s’affranchit du pouvoir royal ntes considérablement affaibli et crée sa propre 1480 dynastie, celle des Plantagenêts, qui règne sur la province d’Anjou au tout début du Xe siècle.
L’administration du comté s’effectue alors depuis Angers où le premier comte avait été installé. Ses successeurs, et parmi eux Foulques Nerra (987-1040), y construisent un véritable palais dont il ne reste aujourd’hui que la grande salle comtale, (aula*), bâtie au Xe siècle et agrandie au XIIe siècle, la chapelle Saint-Laud dédicacée au XIIe siècle et les vestiges d’une salle d’hygiène (n°14).

La construction de la forteresse (celle que l’on visite aujourd’hui) à partir de 1230 va définitivement englober les bâtiments du palais comtal. La proximité immédiate de la Bretagne hostile et les qualités défensives du site d’Angers conduisent Blanche de Castille, mère de Saint Louis, à y construire une véritable citadelle au faîte de l’architecture militaire de l’époque.

Une forteresse royale imprenable

Une construction singulière

Construit au XIIIe siècle, le château domine et verrouille le cours de la Maine ; il intègre le système de défense de la ville, dont l’imposante enceinte est édifiée au même moment pour protéger les quartiers de la rive gauche de la rivière, ainsi que ceux de la rive droite (« outre Maine » d’où le nom du quartier : la Doutre). Il s’agit d’un chantier royal avec des moyens considérables. On y met en œuvre un mélange de matériaux : calcaire, grès et schiste ainsi que le tuffeau pour les parements intérieurs. Certaines pierres font plus de 2 m de long et certains blocs de schiste pèsent de 600 à 700 kg. Si ces matériaux peuvent venir de loin, le creusement des fossés et la création de l’escarpe*, côté Maine, ainsi que les carrières de Saint-Nicolas, devenues depuis l’étang du même nom, situées à un peu plus d’un kilomètre en aval du château sur la rive droite, ont permis de compléter les besoins en schiste.

L’enceinte du château, avec un périmètre de plusde500metdix-septtoursde11à13m de diamètre, accentue la puissance qui se dégage toujours de la forteresse. Deux portes permettaient de pénétrer dans le château. Au nord, la porte de Ville (n° 1), par laquelle le visiteur entre de nos jours, et au sud la porte des Champs (n° 9), au nom bien significatif, qui garantissait à la forteresse un fonctionnement autonome par rapport à la ville. Deux herses consécutives en barraient l’entrée. L’une d’elle est d’ailleurs encore en place : c’est la plus ancienne herse datée en France (C. 1370-1380).

Deux assommoirs*, renforcent la protection de l’accès. Les archères qui strient les façades des tours (bien que l’envergure semble insuffisante pour le déploiement de l’arc) ont de l’extérieur un effet dissuasif. Leur adaptation aux armes à feu les rend plus efficaces.

Cette architecture militaire élaborée, la puissance qui en émane, rendent la forteresse d’Angers quasi imprenable selon les techniques de siège de l’époque.

Une résidence seigneuriale

Le faste des ducs d'Anjou

Aux XIVe et XVe siècles, les ducs d’Anjou, Louis Ier, Louis II et le roi René, qui sont par ailleurs comtes de Provence et revendiquent des territoires italiens, habitent par intermitence le château d’Angers. Ils y installent une cour fastueuse. La grande salle comtale est percée de grandes fenêtres rectangulaires à meneaux et divisée en deux niveaux.
La chapelle, dont la nef unique est couverte de voûtes gothiques angevines, est achevée vers 1410.
On y trouve un petit oratoire chauffé, à l’origine très richement sculpté, qui permet aux ducs d’assister aux offices au chaud et sans se mêler aux autres fidèles.

Le roi René fait construire vers 1440 le logis royal (n° 4) qui prend place entre une aile d’apparat située le long de la Maine (maintenant disparue) et la chapelle. Ce logis comporte sur trois niveaux deux grandes salles doublées au nord d’une galerie. L’escalier en vis qui dessert les étages s’achève par une superbe voûte d’ogive en palmier. Le 1er étage était occupé par la chambre à coucher du duc puis sa chambre de retrait.

Des espaces encore plus intimes comme une étude, un oratoire et des latrines prenaient place dans des tourelles en saillies sur la façade sud. Le second étage était réservé à la duchesse. Le châtelet est édifié vers 1450 pour fermer la cour seigneuriale. Des bâtiments annexes au sud et à l’ouest, détruits, sont maintenant remplacés par la galerie de la tapisserie de l’Apocalypse. En 1480, le roi René meurt sans descendance. Louis XI rattache alors l’Anjou au domaine royal.

De la forteresse militaire à la prison

Un destin contrasté

Les guerres de religion du XVIe siècle consacrent la forteresse comme lieu de détention de nombreux protestants. Henri III comprend l’avantage de posséder ici un point fort susceptible de tenir la Province.

Nommé capitaine du château par le roi en 1585, Donadieu de Puycharic, malgré la demande des habitants de détruire le front nord des remparts, parvient habilement à les rendre encore plus menaçants. La forteresse est alors adaptée aux progrès de l’artillerie. Les toits en poivrière sont supprimés, les murs renforcés et de redoutables terrasses d’artillerie, tournées vers le centre urbain et sur le passage de la rivière, sont aménagées. Les fines archères sont agrandies pour devenir des canonnières.

Ainsi, la monarchie dispose à Angers d’une véritable place de sûreté.
Louis XIV y fait incarcérer pendant trois mois, le surintendant des Finances Fouquet, après son arrestation à Nantes en 1661. Le château d’Angers est alors considéré par le roi comme une petite bastille.
Suite aux combats de la guerre d’Indépendance des États-Unis, de 600 à 700 marins anglais sont emprisonnés entre 1779 et 1781 dans tous les espaces disponibles du château (chapelle, tours, etc...).

Cette utilisation pénitentiaire régulière initiée par les militaires n’échappe pas aux révolutionnaires qui y font naître, au plus fort de la Terreur, la première prison départementale qui ne quitte la forteresse qu’en 1856. L’armée continue d’utiliser parallèlement le château.
Des centaines de prisonniers des guerres napoléoniennes, de toutes nationalités, y sont incarcérés jusqu’en 1814.
Les adaptations du château à l’évolution de l’artillerie et à son usage de prison et de caserne sont en partie responsables de la disparition de bâtiments médiévaux.En 1947, l’armée cède la forteresse à l’administra- tion des monuments historiques ; elle est alors ouverte à la visite.

La tapisserie de l'Apocalypse

Une oeuvre tissée unique au monde

La tenture de l’Apocalypse, commandée à la fin du XIVe siècle par Louis Ier, duc d’Anjou, puis léguée par le roi René à la cathédrale dont elle a orné la nef au cours des grandes fêtes religieuses, est aujourd’hui présentée au château d’Angers. Illustrant un texte du Ier siècle de notre ère (les visions de saint Jean, dernier livre du Nouveau Testament), la tapisserie est un formidable document sur le contexte historique, social et politique du XIVe siècle. La France est alors boulversée par la guerre de Cent Ans, les épidémies, la famine. Ses dimensions (100m conservés sur les 140 m à l’origine), son ancienneté, sa virtuosité stylistique et technique en font un chef d’œuvre du Moyen Âge, unique au monde.
Déconsidérée au XVIIIe siècle, elle a fait l’objet d’importantes campagnes de restauration au XIXe puis au XXe siècle.
Après la Seconde Guerre mondiale, l’Etat décide d’installer la tapisserie dans un complexe muséographique adapté, inauguré en 1954, puis réaménagé en 1996, afin d’assurer à l’œuvre une présentation et une conservation optimale (éclairage avec des fibres optiques, climatisation...).

Visitez le Château d'Angers

2, promenade du Bout du Monde - 49100 Angers
Ouverture : du 2 mai au 4 septembre: 10h – 18h30
du 5 septembre au 30 avril: 10h – 17h30

Dernière entrée 45 minutes avant la fermeture, fermeture des salles 30 minutes avant la fermeture du château.
Fermé le 1er janvier, le 1er mai et le 25 décembre.

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