Le second spectacle de la jeune artiste Marion Siéfert scrute les zones d’ombre de l’enfance dans un solo explosif: sa part de fantasme, son goût de l’obscène et du monstrueux, sa radicale insolence, son sens du plaisir et du jeu, son exigence vis-à-vis du monde des adultes.
Qui écoute encore les enfants? Qui tient compte de leurs envies, de leurs contrariétés, de leur mot à dire? Le Grand Sommeil, c’est celui où se déploient les rêves effrayants et fantasques d’une pré-adolescente de onze ans. C’est également l’histoire d’une absence, celle de Jeanne, jeune fille dont il est justement question, mais qui n’est pas sur scène. La danseuse Helena de Laurens donne corps par sa sidérante présence à un personnage hybride et inquiétant: ni enfant, ni adulte qui se joue des âges, de la bienséance et des idées reçues sur ce que doivent être les petites filles. Exploitant le corps longiligne de l’interprète, la chorégraphie manie avec jouissance la grimace, l’excès et la fragmentation du corps. Au fil d’une performance d’une folle intensité, le spectacle révèle ce que cet âge peut avoir de brutal et d’inquiétant, et donne à entendre l’exigence de tout enfant d’être considéré avec le sérieux d’un adulte.
